The Black Beetle – Par Francesco Francavilla [vidéo]

The Black Beetle est un personnage créé en 2006 par l’artiste italien Francesco Francavilla, grand fan des héros de pulps façon The Shadow ou The Green Hornet.

Pas le temps de lire ? Voici la vidéo qui résume tout !

C’était au départ un simple dessin conceptuel mais l’artiste a décidé d’en faire une série après que les lecteurs de son blog, Pulp Sunday, aient plébiscité le personnage. Après quelques histoires courtes posant les bases de l’univers, Francesco Francavilla va signer chez Dark Horse.

The Black Beetle - No way home
The Black Beetle – No way home

Il va commencer par publier en décembre 2011 une histoire intitulée « Night Shift« , qu’il découpera en trois chapitres de 8 pages, dans le mensuel Dark Horse Present. Puis, en juillet 2012, il lance la mini-série en 4 épisodes « No way out » et annonce une suite intitulée « Necrologue » pour 2013.

Mais cette dernière ne verra jamais le jour et il faudra attendre 2016 pour que le Black Beetle fasse son retour dans une nouvelle mini-série, en 5 épisodes cette fois-ci, intitulée « Kara Böcek« , du nom du pistolet laser utilisé par le justicier masqué.

The Black Beetle - night shift
The Black Beetle – night shift

Bien que de qualité, ces récits brillent surtout par leur mise en scène graphique et par le soin avec lequel Francesco Francavilla retranscrit l’ambiance des pulps des années 40 et 50, tout en créant une identité visuelle unique.

Je vais d’ailleurs vous présenter ici les 5 éléments qui, selon moi, rendent époustouflantes les pages de ce comics.

Un univers rétro crédible

The Black Beetle - No way home
The Black Beetle – No way home

Entrer dans The Black Beetle, c’est se retrouver immédiatement plongé dans un univers de gangsters élégants à chapeaux, de saboteurs nazis équipés d’armes extravagantes et de criminels à gimmick.

Mais Francesco Francavilla tient aussi à coller à l’ambiance historique des serials et des pulps et va donc peupler ses pages d’avions à hélice, de vieilles automobiles et de tous les accessoires et costumes nécessaires à l’évocation de cette période.

The Black Beetle - No way home
The Black Beetle – No way home

Un réalisme très stylisé

The Black Beetle - night shift
The Black Beetle – night shift

Francavilla se rattache à une famille graphique d’artistes qui cherchent à dépeindre le réel en stylisant au maximum leurs traits et leur encrage.

Il y a sans doute là un lien avec l’approche des Fumetti, ces fameuses bandes-dessinées italiennes dont le rythme régulier de parution et la public ation en noir et blanc a permis à de nombreux artistes d’exceller dans l’art d’aller à l’essentiel dans leur dessin.

 The Black Beetle - No way home
The Black Beetle – No way home

Dès lors, Francesco Francavilla nous entraîne dans un jeu d’équilibriste graphique permanent entre un rendu précis et détaillé des éléments (et notamment des plis des vêtements) et une réduction drastique des lignes inutiles ou superflues.

On passe ainsi de cases vides de décors à la découverte soudaine de lieux à l’architecture ou à la décoration détaillée.

Ce grand écart se retrouve aussi dans le trait même de l’encrage. Francavilla ne pose pas des lignes rigides ou trop fermées. Il ne cherche pas non plus à varier l’épaisseur de son trait pour simuler le volume.

Son encrage semble, au contraire, brut, rapide, spontané et parfois même grossier, avec notamment des hachures d’ombre dont les traits ne sont ni parallèles ni de la même largeur.

The Black Beetle - Night Shift
The Black Beetle – Night Shift

Mais quand on y regarde de plus près, on remarque vite que tout reste d’une précision remarquable (regardez le sarcophage ci-dessus !).

Les ombres, plis et détails sont parfaitement positionnés et le travail sur les reflets ( des bottes et des véhicules) est absolument confondant de réalisme.

L’omniprésence des ténèbres

The Black Beetle - No way out
The Black Beetle – No way out

Bien évidemment, qui dit « polar pulp » dit pages chargées d’ombres ! Francesco Francavilla s’inscrit dans la veine des Alex Toth, Chris Samnee et autre Eduardo Risso et sculpte très souvent ses cases dans les ténèbres.

Il use sans en abuser des aplats de noir pour structurer son cadre et guider le regard vers les éléments importants.

The Black Beetle - Night Shift
The Black Beetle – Night Shift

Et il est d’autant plus habile à cela que, assurant sa propre colorisation, on voit qu’il pense déjà à la façon dont il va appliquer ses couleurs, comme dans la page ci-dessus où il place le héros entre ombre / le rouge (les ennemis) et lumière/ le violet (la femme à protéger).

Des choix de couleurs ingénieux

The Back Beetle - Night shif
The Back Beetle – Night shift

C’est peut-être par manque de temps mais Francesco Francavilla utilise toujours une palette de couleurs restreinte et presque récurrente. Il privilégie ainsi très souvent des rouges orangées, du jaune (lui aussi parfois orangé), et quelques tons froids comme le bleu ou le violet.

Il ne va pas alors chercher à restituer fidèlement les couleurs de ce qu’il représente mais plutôt à travailler sur l’ambiance des scènes.

The Back Beetle – No way out

Les rouges et oranges sont ainsi souvent utilisés pour dépeindre un acte violent ou l’imminence d’un danger. Le jaune lui sert à mettre un élément en exergue, soit parce qu’il est employé comme une source de lumière soit parce qu’il est plaqué sur un élément (c’est le cas du criminel de l’histoire No Way Out qui porte une tenue jaune).

Francesco Francavilla peut ainsi jongler avec ces couleurs d’une case à une autre, créant ainsi un rythme complémentaire à la narration du dessin, un peu comme s’il s’agissait d’une bande son accompagnant l’image.

Un découpage expérimental

The Black Beetle - No way out
The Black Beetle – No way out

Enfin, Francesco Francavilla fait quelque chose que beaucoup d’artistes semblent avoir oublié aujourd’hui : de l’expérimentation purement graphique dans le découpage.

Si son storytelling fait souvent très cinématographique dans ses cadrages et idées d’enchainements, il nous rappelle de temps en temps que le comics possède aussi ses propres forces en matière d’art visuel et de narration.

The Black Beetle – No way out

Il joue ainsi avec la forme des cases et leur agencement pour proposer des structures de pages originales, qui viennent flatter l’œil sans nuire au récit. Dans la page ci-dessus par exemple, il restitue le chaos du combat à mains nues en créant une mosaïque de coups et de ripostes. Il semble même y glisser un petit hommage à la série TV Batman des années 60, avec cette inclusion des onomatopées qui viennent s’incruster dans la narration séquentielle.

En conclusion

Que ce soit avec la mini-série « No way out » ou sa séquelle « Kara Böcek », The Black Beetle vaut le détour si vous aimez les justiciers pulp et surtout, l’audace graphique dans les comics. C’est un de ces rares titres dont l’approche visuelle est à la fois respectueuse du genre qu’il évoque et innovante par rapport à ses codes. Je ne peux donc que vous inviter à aller vous plonger dans les ruelles sombres de Colt City pour y guetter la présence furtive du Black Beetle !

Et vous, avez vous lu et aimé cette série ? Dites-le moi dans les commentaires !